Comme nous l’avons relevé dans l'artcile portant sur les perceptions autour du sida, le traitement n’existe pas, seule
la prévention est le moyen le plus efficace de lutte. Le plus privilégié ici
est le préservatif ou condom ou capote anglaise, il est utilisé en Afrique et
présente l’avantage d’être moins coûteux et facilement accessible. Il s’avère être
une innovation par rapport aux pratique sexuelles et par rapport aux rapports
sexuel normal, selon les canons traditionnels.
De ce fait, promouvoir l’utilisation
du condom suppose un changement de comportements chez les prostituées et leurs
clients et la question qui surgit reste
celle de savoir comment amener ces individus à changer leurs pratiques. A la
base, il y a le problème de l’attitude vis-à-vis du sida qui conditionne les
motivations au changement. Cette attitude dépend de la représentation que l’on
se fait de la maladie, de la perception que l’on a et des connaissances qu’ont
les individus à son sujet. « Si par attitude, nous entendons des
idées fondamentales relatives au monde, idées dirigeant la conduite des
individus et forgeant leur personnalité, nous posons pour acquis le fait que
l’attitude précède et dirige la pratique. » (p30). Il est possible de
créer dans ce cas, des réflexes dans l’utilisation du condom, sans que l’attitude
vis-à-vis de la maladie ait été profondément modifiée. Le procédé classique
souvent utilisé pour susciter un changement de conduite est celui du changement
d’attitudes, provoquant le changement de pratiques.
Les structures sociales sont
encore celles des sociétés dites traditionnelles se caractérisant par la
permanence et une certaine résistance aux changements. Le changement au sens de
G.Rocher comme une transformation au sein d’une collectivité affectant de manière
durable la structure ou le fonctionnement de l’organisation sociale et
modifiant le cours de son histoire (1968, p81). Il faudra qu’un changement
s’opère au niveau des structures mentales régissant le représentation de la
maladie et du rapport sexuel au sein de la collectivité, pour que l’attitude et le comportement des individus soient
modifiés. Ou alors, il faudra que l’individu réussisse à renverser en lui les
schémas traditionnels de la représentation de la maladie et du condom pour
laisser place à de nouveaux. L’amulette ou le fétiche sont pour beaucoup plus
efficaces pour se prémunir contre la maladie que le condom.
Ayant recueillis des informations
auprès des prostituées, l’auteur Béat note que « l’idée communément admise
relative au refus d’usage du condom est que les hommes y sont réticents » (p39) et « il y a chez
les femmes un blocage suscité par la répulsion à accueillir dans son corps un
élément plastique pour lequel elles ne
savent pas très bien quelles en seraient les retombées ». Pour les
hommes, le condom représente une limitation au plaisir, et une frustration
certaine du fait du dépôt du sperme hors du vagin féminin lors d’un rapport
sexuel, et laisse un sentiment inachevé. Une des justifications principales alléguées,
à savoir la diminution du plaisir, se rattache aussi à toute conception
traditionnelle du rapport sexuel ; celui-ci a pour but soit la
procréation, soit la jouissance.
Dans le cadre du rapport de type
prostitutionnel, il s’agit pour l’homme de jouissance, d’exprimer, en
satisfaisant un besoin biologique, sa virilité, en se servant de la femme,
utilisée alors par lui comme support. Il exprime à travers sa virilité toute se
vigueur, et l’acte sexuel devrait être un acte complet. Il est en fait perçu
comme un combat dans lequel l’homme devrait manifester sa domination, sa
supériorité vis-à-vis de la femme. Celle-ci passe nécessairement par le fait
d’arriver à un orgasme accompli, et une éjaculation directe dans le sein de la
partenaire. A cause de cette image sociale, de cette conception du rapport
sexuel, le port du préservatif -qui bloque totalement une éjaculation dans le
vagin de la partenaire - s’oppose à cette réalisation. Il y a une réticence et
une frustration chez l’homme à voir son « précieux » liquide séminal
se répandre hors du vagin de sa partenaire, cela relève du gaspillage ou une
perte frustrante. Le condom court-circuit le
déroulement normal du rapport sexuel et laisse à l’individu un sentiment
d’inachevé, de non accomplissement totale et à l’opposé de ce qu’il
rechercherait en allant chez la prostituée.
Dans le rapport sexuel, il y a
deux objectifs : exprimer la virilité de l’homme et permettre la procréation
pour la femme. Ainsi, il exprime la force physique de l’homme, sa virilité et
sa domination sur la femme. Pour la procréation, il permet d’élever la femme à
un statut de mère respectée et responsable dans la société traditionnelle. Le
rapport sexuel moderne se veut rapport
protégé des risques de contamination des MST et de maternité. Le condom
se présente comme une innovation contribuant à un certain développement de nos
populations en les protégeant des MST et des maternités non désirées. Dans le même ordre d’idées, F. Perroux (1961
pp16) définit le développement
comme « une combinaison des
changements sociaux d’une population qui
la rende apte à faire croître cumulativement et durablement son produit réel et
global ». Alors, le condom devrait pouvoir s’y inscrire en tant que
facteur de changement des comportements
sociaux en vue du mieux être des populations. Il y aurait lieu de ne plus faire
« capoter » mais du faire porter au sein de la population à haut risque.
Bibliographie
- F.Perroux : Qu’est ce que le développement in Etudes, Janvier 1961
- Guy Rocher : Introduction à la sociologie générale, tome3, le changement social, Edition H.M.H, points, Ltée, 1968.
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